Nos voisins helvètes accueillent du 2 au 27 juillet l’Euro de football. Une aubaine pour le pays qui s’est lancé, sous la houlette de Dominique Blanc, patron de l’Association suisse de Football (ASF), dans une politique volontariste de football accessible à toutes et tous. Si le nombre de pratiquantes a explosé ces dernières années, passant de 20 000 en 2010 à plus de 40 000 fin 2023, il reste du travail sur la professionnalisation des joueuses : c’est simple, il n’existe pas encore de ligue professionnelle pour les femmes en Suisse.
« Dans les trois dernières années, on a eu une augmentation de 30 % du nombre de filles qui pratiquent le football », insiste Dominique Blanc. « Mais c’est vrai qu’en matière de football professionnel, là, on a encore de grandes différences avec les garçons », concède-t-il. Si la formation des joueuses est plutôt performante, c’est ensuite que ça se complique. « La post-formation au niveau d’excellence est plus difficile. C’est un défi qui est sur la table », confie le chef de l’ASF.
Un modèle économique qui ne permet pas la professionnalisation
La faute au modèle économique du football suisse : contrairement à leurs voisins anglais, portugais ou espagnols, les clubs pros suisses n’ont pas les moyens d’assumer une section pro féminine. « Les clubs professionnels ont des petits moyens parce qu’on n’a pratiquement pas de recettes médiatiques. Une équipe féminine dans un club anglais ou portugais ou espagnol représente 1 ou 2 % du budget global. En Suisse, elle en représenterait 10 à 15 % », énumère-t-il.
Sur le plan de la perception, Dominique Blanc estime que le sport « est en train de prendre sa place ». Pour Linda Vialette, présidente depuis plus de 30 ans du Yverdon Sport féminin, club suisse descendu en deuxième division à l’issue de la saison 2024-2025, le bilan est un peu plus mitigé. « On est encore une sous-division du football masculin, c’est clair. Même si ça a quand même beaucoup changé au niveau de l’image et de l’acceptation dans les clubs masculins », estime-t-elle.
Encore trop de clichés
Mais un peu comme en France, le football subit encore les mêmes clichés : « “C’est trop lent, ce n’est pas assez physique, les gardiennes sont nulles…” Ce sont des clichés encore très, très, très importants. Comment amener les spectateurs ou les téléspectateurs à s’intéresser à ça ? », s’interroge Linda Vialette. « Chez nous aussi, les gens s’attendent à ce que ça aille aussi vite, aussi haut, aussi fort que les hommes », ajoute-t-elle. « Il y a encore des poches de résistance qui sont basées surtout sur de l’ignorance ou des fausses croyances », analyse Dominique Blanc.
Dans les postes décisionnaires ou d’entraîneur, les femmes sont également peu représentées en Suisse. « Nous avons environ 3 % de femmes au niveau du diplôme d’entraîneur UEFA-C… », souligne Marisa Wunderlin, ex-entraîneure du FC St. Gallen 1879. Et si elle concède que ce n’est pas un problème suisse mais structurel du football, elle plaide plus globalement pour une massification de la formation des femmes dans le football.