« C’est vexant pour les producteurs de lait de voir leur travail si peu reconnu. Pour vivre correctement, la bouteille de lait doit être achetée par les clients au prix d’un euro. Cette baisse, sans concertation, est intolérable », proteste Emmanuel Pierret, agriculteur au Gaec de l’Union, à Montigny-sur-Chiers.
Sa ferme emploie cinq salariés, dont deux stagiaires. Avec son épouse et son frère (associés), ils produisent trois millions de litres de lait par an, ce qui représente 80 % de leur chiffre d’affaires. Les 10 000 m2 de bâtiments couverts abritent près de 750 bovins. C’est une importante exploitation laitière dans le bassin de Longwy.
Le lait, un enjeu pour les supermarchés
Depuis 2022, la coopérative Sodiaal (Yoplait, Candia, Entremont, etc.) lui rachète son lait entre 400 et 450 euros pour 1 000 litres. Une somme qu’Emmanuel Pierret n’estime pas encore suffisante, mais « déjà mieux que les dix dernières années, où nous frôlions les 300 à 380 euros pour 1 000 litres ». Il gagne correctement sa vie, ce qui lui permet de rémunérer convenablement ses salariés, de se préparer à la transition écologique qui impose de nouvelles normes et de réaliser des investissements pour être compétitif. Mais une bouteille de lait vendue aux consommateurs à 92 centimes d’euro le litre par le hard discounter Lidl ne « permet pas de payer les agriculteurs ». Selon lui, le prix rémunérateur pour les producteurs est au moins d’un euro le litre.
« Un produit d’appel »
Au supermarché Lidl de Longwy, les clients interrogés sur la question semblent divisés. Certains comprennent parfaitement et sont prêts à jouer le jeu : « Désormais, je ferai attention », remarque une retraitée. Pour d’autres, le lait doit être « peu coûteux et c’est tant mieux », parce qu’ils viennent dans ce type d’enseigne pour « faire des courses par cher ». Malgré tout, de nombreux chalands soutiennent les agriculteurs. Pour les supermarchés, la bouteille de lait est uniquement « un produit d’appel », rappelle le paysan.
Au niveau mondial, les produits laitiers ont augmenté de 2 %, prouvant ainsi la cote qu’ils ont auprès des acheteurs.
Des manifestations en août
Emmanuel Pierret explique que si la grande distribution met la pression aux industriels pour la baisse des prix, par effet boule de neige, les producteurs de lait du bassin de Longwy devront faire des efforts. « C’est inconcevable. Nous ne pouvons pas travailler à perte. Nous parlons une nouvelle fois de notre survie », clame l’Ignymontois.
Dans ce climat tendu, la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) et les producteurs de lait vont mener des actions de contrôle du prix du lait en grande surface à Longwy et Longuyon. Et ce, dès le mois d’août. L’objectif est de faire de la pédagogie auprès des consommateurs et de réexpliquer leur travail.
La Meurthe-et-Moselle comptait, en 2010, près de 1 000 producteurs. En 2024, il n’en reste plus que 600.